vendredi 18 juin 2010

Conduire en sens inverse...

Je ne dors pas. Je dors mal.

Je me réveille et j'entends les oiseaux, puis le traffic, puis je me demande si le bruit des voitures empêchent les oiseaux de s'entendre. Et donc de se réunir, de se rejoindre.
Y a-t-il trop de bruits autour de nous qui nous empêche de nous rassembler? Sommes-nous trop distraits par tout ce qui nous entoure trop?
Se rassembler...
Le Carrefour vient de se terminer. Il s'est ouvert avec le parcours, grand rassemblement, encore plus populaire que l'an dernier. Tout le milieu théâtral, public compris, bénévoles, tous se sont rassemblés au ZINC pendant deux semaines. Ils ont mangé du théâtre et des ptits plats chauds bien bons. Pendant le parcours, les feux d'artifice éclataient au stade où le baseball et ses amateurs faisaient la fête. Heureusement pour le Carrefour, le hockey s'est terminé juste à temps, mais les rencontres autour des matchs illustrent aussi mon propos: le monde veut être ensemble. Non?

Je m'inquiète souvent sur l'avenir du théâtre. Sur l'avenir du Québec, de la langue. Je m'inquiète sur ce que nous serons dans dix ans. Et il me semble que personne ne prend la parole pour soulever les bonnes questions. La politique me déprime. Le confort et l'indifférence dont parlait Denys Arcand en 80 est un fléau encore plus présent, le traffic faisant trop de bruit pour nous entendre. Mais ces bulles qui éclatent, ces moments de grâce où tous se réunissent autour d'une même chose, ces petits moments d'union, de solidarité (solidité vous voulez dire?) me donnent de l'espoir. De petits espoirs mais de l'espoir quand même.
Et le parcours, le ZINC me donne de l'élan.
Et soulève des questions... encore.

Pourquoi n'arrivons-nous pas à être soulevé et réuni tout le long de l'année? Comment se fait-il que l'endormissement nous menace toujours autant? Pourquoi ne souhaitons-nous pas d'être toujours aussi éveillé durant l'année que durant le Carrefour? Il nous faut nous poser la question à savoir ce que nous voulons que soit le théâtre dans dix ans et une partie de la réponse se trouve dans le rassemblement, l'événement. Vous me direz que chaque soir, les gens se réunissent pour aller au théâtre, mais selon moi, une partie ce rituel est rendu trop mécanique, acquis, abonné, ce qui fait que les spectateurs se déplacent, certes, mais ne se rassemble plus. Pour vrai. On leur présente ce qu'ils veulent voir, on répond aux caprices... on est gentil. Je généralise, mais pour la réflexion, ça vaut le coup... Ils sont seuls dans leur siège au milieu d'une foule de plus en plus anonyme.
Et nos mécanismes ne suffiront pas à les retenir....

Qui sera le public dans dix ans? Ou sont ceux qui ont trente ans? Comment les interpeller? Et je pense que la réponse est dans l'idée de l'événement, du rassemblement par l'événement. Le théâtre doit dépasser ses propres frontières et s'assurer que chaque fois que le rassemblement a lieu, il propose que la rencontre, le spectacle, la proposition, soit radicale. Entendez moi, je dis "radical" comme dans son sens le plus éthymologique qui veut dire racine. Rassemblement. Que le théâtre dépasse la simple représentation et que nous nous assurions que ce qui sera présenté invitera vraiment au dépassement de la forme, faisant de la représentation une chose plus qu'unique.
Ma génération a besoin de se faire raconter Antoine et Cléopâtre et la manière dont le faisait la gang néerlandaise leur donnerait certainement le goût de revenir et revenir encore. Les moyens! je vous entends. Les idées n'ont pas de prix et la volonté de contrer à tout prix le confort et l'indifférence non plus.
Il faut que le théâtre soit fête à chaque soir et que sa forme, pour son propos, s'enligne autrement pour s'assurer de briser les moules et que nos institutions, nos lieux existants et ceux qui sont temporaires, les plus petits, poussent toujours plus loin les règles de la représentation. Il faut mettre tout en danger, le public suivra.
Ils ont marché non?
Et même s'ils n'ont pas tout vu, ils ont trippé, mieux, ils sont revenus.
Ils sont montés sur la scène?
Ils en ont parlé comme quelque chose de spécial.
Ils s'en rappelleront.
C'est une invitation que je lance.

Finalement, je propose que nous soyons le traffic.

jeudi 3 juin 2010

les montagnes...

Début juin.
Temps Jell-O.
Mon amie Marie me faisait remarquer que je n'avais pas foulé le sol de ce blog depuis longtemps et elle a bien raison.
La dernière fois, je commençais le travail sur la montagne rouge et là, la montée est terminée. Je dis terminée mais on continue à peaufiner et il y aura première en octobre. Or, je ne pense pas que les choses doivent se figer, bien au contraire.
Je ne m'étais jamais senti aussi nerveux à une première du TFT.
Est-ce la fatigue après parcours?
Certainement. Mais aussi, sans doute, parce que j'ai mis en scène ce texte comme je ne l'avais jamais fait. Une approche bien différente. Autrement ludique. Et que j'ai perdu certains de mes repères. Une certaine assurance aussi. Je me sens fragile. Vulnérable.
Tout ce qui a entouré ce projet, de la première lecture à aujourd'hui, s'est déroulé différemment.
L'approche théâtrale, le processus de travail, la direction.
Mais je suis très fier.
Fier de moi (on peut se le dire) et fier de mes amis.
Et je suis mystifié par la réaction des autres, plus sensible à ce qu'ils pensent.

Je me sens tout drôle.
Mais heureux.

Et on entame le processus autour de Ducharme.
Quelle autre montagne immense...

Sentez-vous que quelque chose change? Sentez-vous l'odeur de fumée qui annonce un grand feu (de joie je l'espère)..?
Sentez-vous la fin du Banquier? La médi@crité qui empeste? (elle n'est pas de moi, celle-là?
En avez vous marre de l'attente du changement? De la montée de l'horreur démagogique conservatrice?
C'est peut-être ça qui me travaille et qui mélange mes sentiments entre mon travail et sa résonnance? J'ai envie de crier, je crie, je vais crier encore... Et le vide autour absorbe le son qui se perd...
Je suis là-dedans.

mercredi 14 avril 2010

les héros

Michel Chartrand vient de partir.
La politique québécoise est encore et encore dans l'eau bouillante.
La fonction publique négocie. Fait divers.
Fabienne Larouche donne son avis. Et écrit un roman sur Birginie.

Nous n'avons plus de héros. Ou de si petits.
Y a-t-il un héros grande gueule qui va se lever et parler et dire que ça a pas de bon sens que nous soyons à ce point démoraliser du système politique, des commissions d'enquête qui n'ont pas lieu? Y aura-t-il une véritable mobilisation pour appuyer les infirmières? Parce qu'il faut être à leur côté dans la rue... Parce que leur combat c'est le nôtre. C'est celui de tous.
Y a-t-il quelqu'un qui va dire que Birginie en roman c'est médiocre et qui ne s'excusera pas de le dire?
Y a-t-il un Michel Chartrand dans la salle?

Je me demande tout cela, je me demande ce que je fais, moi. Sinon lire les rubriques, les articles, les analyses, les partager sur Facebook, les commenter et retourner au travail en prenant un thé.
Je me demande si je ne suis pas moi aussi trop juste cynique, éteint.
Je me sens seul. Vous sentez vous seuls?
Peut-être que nous nous sentons tous seuls et que ça n'aide pas... et que nous pensons, chacun dans notre coin être seul à se sentir seul. Et que ce sentiment partagé de solitudes nous paralyse.

Comment se fait-il que nous ne nous retrouvons pas dans l'action? Que le mouvement ne nous emporte pas? (Quel mouvement?) Comment se fait-il que nous acceptons que la parole circule seulement selon les moyens qui nous sont donnés de nous exprimer et que jamais nous ne débordons? Pourquoi sommes-nous si polis? Pourquoi suis-je si poli?

Je me rappelle à l'ouverture des États généraux du théâtre. La Ministre de trop d'affaires et de la condition féminine ouvrait le week-end avec un discours creux qui commençait par: je sais pas aussi bien parler que vous autres les artistes.... J'AI EU LE GOÛT DE HURLER: HEY, ON S'EN FOUT DE TA JOKE PLATE, DIS NOUS DES AFFAIRES INTELLIGENTES, ANNONCE NOUS DE QUOI, MET LE FEU! Mais non: le parti libéral gna gna gna... Mais je n'ai pas crié et je n'ai pas compris que personne ne crie. Nous avons été polis, et fais des états généraux polis, ordonnés... même la madame qui animait l'assemblée nous a dit qu'on était sage. SAGE! LES ARTISTES DE THÉÂTRE DU QUÉBEC ÉTAIENT SAGES!

Je me rappelle encore une fois que la Ministre des communications et des autres affaires est venu voir une répétition des Misérables parce qu'elle pouvait pas être à la conférence de presse. Grosse gang de chanteurs, gros orchestre, ça sonne pas pire. Elle monte sur la scène: le partir libéral participe chaque année gnagn agnaaaaaaaaaaaa. AUCUNE PASSION. AUCUN EMPORTEMENT. Et on a fermé notre gueule. On l'a laissé être plate...

Michel Chartrand est parti. Ça doit être le fun là-bas de se retrouver avec ses vieux potes qui ont changé, déplacé le Québec. Mais la vue sur les condos de Laval et de la Pointe Sainte-Foy doit être bien ennuyante.

lundi 5 avril 2010

sur la montagne...

Bonjour,

ce matin est un matin important pour moi. Nous sommes le 5 avril et je recommence à répéter. C'est que depuis Noël, je n'ai pas mis les pieds dans une salle de travail, sauf exceptions (1 journée et demi à Laval pour la reprise de D'Alaska). Je n'ai pas souvenir d'avoir passé autant de temps hors les murs, mais en mes murs.
La plupart du temps, je partais en voyage, mais là, je suis resté chez moi, dans mon monde, à préparer les mois qui viennent, à lire, à passer beaucoup trop de temps sur Facebook à commenter l'actualité, à me reconnecter, à voir des enfants naître (deux depuis janvier). À écrire des demandes de subventions.

Les deux premières semaines ont été difficiles. Aucune notion du temps. Une sensation étrange de non-existence, un besoin de se justifier constamment. Puis tranquillement, je me suis mis à comprendre le temps autour de moi, je m'en suis fait un allié. Je l'ai déjoué. Et j'ai compris ce que je faisais, ce que j'y gagnais. Une véritable incubation, un voyage lent, différent...

J'ai nagé aussi.
Oh que j'ai nagé.
Et j'ai laissé pousser mes cheveux. Jamais été aussi longs depuis ma toute jeune vingtaine.

En tout cas, aujourd'hui, je recommence, je me replante les pieds dons mon monde. Je redeviens le metteur en scène et pour ça, je m'en vais sur la montagne. La montagne rouge de Steve Gagnon. Un beau périple s'annonce. Une aventure différente, une prise de parole poétique. Un largage d'émotions. Ça fait plus d'un an qu'on s'y prépare et là, on se lance. On s'en va vers la mouture finale. Je suis nerveux. J'ai laissé les images m'envahir et parfois, j'ai l'impression que je ne saurai pas transmettre précisément ce que je veux. Mais je suis de même, un peu intense.

Pourquoi ici ce matin? Pourquoi ce blog? Je ne sais pas... Je relisais les texte de Hugues Frenette qui partage ses impressions sur son travail, et je me suis dit que je pouvais lui répondre, l'accompagner (s'il le veut bien évidemment). Aussi parce qu'au Japon, j'ai aimé faire ceci. Le contexte aidait, mais ça se crée un contexte non?
Parce que ceux qui me connaissent le savent: j'aime bien chialer (L'utilisation du mot chialer est en rien péjorative ici, je l'utilise de façon imagée. Si l'envie me prend de chiâler pour le vrai, je le préciserai ou si vous trouvez que je chiâle, dites-le, on en discutera).

Bon.

On verra bien.